Et de quatre.
Posté : 20 janv. 2021, 10:11
Bonjour tout le monde,
Préambule : je rappelle que, faute de mieux, je place au dessus de toute autre ce qu'on appelle la médecine fondée sur les faits, ce qui m'a notamment conduit à me passionner pour la notion de niveau de preuve scientifique (pdf). Quelqu'un qui se voit diagnostiquer une maladie aussi grave que la sep peut l'être, se retrouve volontiers désemparé et fournit alors une proie idéale pour les gourous et autres charlatans qui lui proposeront des prises en charge inspirées d'on ne sait quoi, qui n'auront jamais été démontrées comme étant reproductibles (la logique voudrait que les mêmes causes produisent régulièrement les mêmes effets), et pour on ne sait quel résultat ; la seule chose à peu près certaine face à de tels vautours étant l'allègement du compte en banque du patient...
Ceci étant posé
. Hier soir j'ai consulté un ORL pour une gêne aussi légère que persistante à hauteur du larynx. A mon âge et étant donné mon appétence coupable pour le cigare, il y avait un léger stress mais ce stress a très rapidement été écarté par l'examen : il ne s'agissait que d'un vulgaire kyste auquel je vais maintenant pouvoir sereinement m'habituer.
Au début de la consultation, j'imagine que c'est le protocole parce que la question est systématique, le toubib s'enquiert de savoir si j'ai quelque pathologie remarquable à lui signaler et je lui parle donc naturellement de l'existence de ma sep, "mais je n'ai jamais pris de traitement" : dans les pathologies lourdes comme la sep peut l'être, c'est surtout l'existence du traitement, plus que celle de la maladie elle-même, qui est susceptible de compliquer les choses pour un médecin appelé à intervenir sur autre chose, donc autant anticiper et aller directement à l'essentiel.
Houuuuu, ce que je n'avais pas dit là, comment je lui ai ouvert la boite de Pandore
. Il est parti dans une longue démonstration sur les maladies auto-immunes, le mode de vie occidental qui jetait de l'huile sur le feu, le chamanisme ou la médecine traditionnelle chinoise "qui n'avaient pas besoin de chimie", la nécessité de trouver "le bon équilibre entre le corps et l'esprit", "chacun impacte l'autre", enfin le discours habituel. Il ne m'a pas parlé de chakras mais il était à deux doigts
. Plus généralement, selon lui j'avais "compris et fait la seule chose qu'il fallait faire"
De mon côté, en tant que patient, je cultive mes contradictions : ma phase d'acceptation (1995 - 1997) avait effectivement, en particulier, consisté à prendre beaucoup de recul par rapport au rationalisme occidental, en particulier médical (il m'avait à l'époque très rapidement paru évident que la médecine était larguée face à la sep) et à essayer de me rapprocher de ce bon équilibre en le corps et l'esprit, à travers notamment une ouverture aux philosophies orientales, au premier rang desquelles le tao : dans le discours de mon ORL j'étais en terrain connu, cartographié, en gros tout ce qu'il présentait comme efficace pour atteindre une rémission prolongée, bin en son temps j'étais passé par là. Il reste tout de même l'objection bateau, que je n'ai pas manqué de lui placer d'entrée de jeu, du "autant de sep que de sépiens" : un seul exemple, le mien pas plus qu'un autre, n'a jamais valeur de preuve, la seule conclusion qui s'impose est que j'ai eu beaucoup de chance, la patronne reste la sep et je reste à la merci de ses sautes d'humeur. Si je vais bien après tant d'années, ce n'est pas tant le résultat des changements apportés à ma vie que du seul bon vouloir de ma colocataire : rien ne permettant déjà d'affirmer que ce que j'ai entrepris aurait eu une quelconque efficacité contre ma sep, considérant par ailleurs le "autant de sep que de sépiens", construire une généralisation sur une base aussi branlante est logiquement et moralement impossible. A ce sujet, les charlatans et les gourous démontrent à l'occasion qu'ils arrivent très bien à tuer leurs patients : comment distinguer parmi eux le bon grain de l'ivraie ?
Moralement impossible certes, mais bon, ça commence à faire beaucoup : j'en suis désormais à quatre docteurs en médecine, ma généraliste et trois spécialistes (un interniste, une neurologue et donc cet ORL qui, au fait, a obtenu son diplôme de médecine à Paris), qui soit déclarent ma sep "guérie", soit généralisent carrément que la sep peut être soumise à un contrôle assez complet de celui qui en est atteint ; et que ce contrôle est toujours de la même nature, et que cette nature est précisément celle que je résumais dès ma présentation sur ce forum, à travers la phrase de DH Lawrence : "la vie n’est acceptable que si le corps et l’esprit vivent en bonne intelligence". Si j'ajoute à cela que cette façon d'aborder la maladie m'avait en son temps, on était alors en 1996, été (lourdement) suggérée par une amie d'enfance qui terminait des études de médecine, si j'y ajoute également ce que j'appelle, faute de terme plus adapté, le "regard amoureux" de mon neurologue historique la dernière fois qu'on s'est vu, comme celui de la doctoresse qui dirige l'établissement où j'allais très occasionnellement passer mes IRM (bon, aucun de ces deux derniers n'est non plus parti dans un discours sur les bienfaits du chamanisme, n'exagérons pas...), la coupe commence à être bien pleine.
Bref, j'ai un gros problème cognitif, sur ce coup... Et pour les jeunes diagnostiqué(e)s, je pose ça ici, faites-en ce que vous voulez
.
A bientôt,
Jean-Philippe.
Préambule : je rappelle que, faute de mieux, je place au dessus de toute autre ce qu'on appelle la médecine fondée sur les faits, ce qui m'a notamment conduit à me passionner pour la notion de niveau de preuve scientifique (pdf). Quelqu'un qui se voit diagnostiquer une maladie aussi grave que la sep peut l'être, se retrouve volontiers désemparé et fournit alors une proie idéale pour les gourous et autres charlatans qui lui proposeront des prises en charge inspirées d'on ne sait quoi, qui n'auront jamais été démontrées comme étant reproductibles (la logique voudrait que les mêmes causes produisent régulièrement les mêmes effets), et pour on ne sait quel résultat ; la seule chose à peu près certaine face à de tels vautours étant l'allègement du compte en banque du patient...
Ceci étant posé

Au début de la consultation, j'imagine que c'est le protocole parce que la question est systématique, le toubib s'enquiert de savoir si j'ai quelque pathologie remarquable à lui signaler et je lui parle donc naturellement de l'existence de ma sep, "mais je n'ai jamais pris de traitement" : dans les pathologies lourdes comme la sep peut l'être, c'est surtout l'existence du traitement, plus que celle de la maladie elle-même, qui est susceptible de compliquer les choses pour un médecin appelé à intervenir sur autre chose, donc autant anticiper et aller directement à l'essentiel.
Houuuuu, ce que je n'avais pas dit là, comment je lui ai ouvert la boite de Pandore


De mon côté, en tant que patient, je cultive mes contradictions : ma phase d'acceptation (1995 - 1997) avait effectivement, en particulier, consisté à prendre beaucoup de recul par rapport au rationalisme occidental, en particulier médical (il m'avait à l'époque très rapidement paru évident que la médecine était larguée face à la sep) et à essayer de me rapprocher de ce bon équilibre en le corps et l'esprit, à travers notamment une ouverture aux philosophies orientales, au premier rang desquelles le tao : dans le discours de mon ORL j'étais en terrain connu, cartographié, en gros tout ce qu'il présentait comme efficace pour atteindre une rémission prolongée, bin en son temps j'étais passé par là. Il reste tout de même l'objection bateau, que je n'ai pas manqué de lui placer d'entrée de jeu, du "autant de sep que de sépiens" : un seul exemple, le mien pas plus qu'un autre, n'a jamais valeur de preuve, la seule conclusion qui s'impose est que j'ai eu beaucoup de chance, la patronne reste la sep et je reste à la merci de ses sautes d'humeur. Si je vais bien après tant d'années, ce n'est pas tant le résultat des changements apportés à ma vie que du seul bon vouloir de ma colocataire : rien ne permettant déjà d'affirmer que ce que j'ai entrepris aurait eu une quelconque efficacité contre ma sep, considérant par ailleurs le "autant de sep que de sépiens", construire une généralisation sur une base aussi branlante est logiquement et moralement impossible. A ce sujet, les charlatans et les gourous démontrent à l'occasion qu'ils arrivent très bien à tuer leurs patients : comment distinguer parmi eux le bon grain de l'ivraie ?
Moralement impossible certes, mais bon, ça commence à faire beaucoup : j'en suis désormais à quatre docteurs en médecine, ma généraliste et trois spécialistes (un interniste, une neurologue et donc cet ORL qui, au fait, a obtenu son diplôme de médecine à Paris), qui soit déclarent ma sep "guérie", soit généralisent carrément que la sep peut être soumise à un contrôle assez complet de celui qui en est atteint ; et que ce contrôle est toujours de la même nature, et que cette nature est précisément celle que je résumais dès ma présentation sur ce forum, à travers la phrase de DH Lawrence : "la vie n’est acceptable que si le corps et l’esprit vivent en bonne intelligence". Si j'ajoute à cela que cette façon d'aborder la maladie m'avait en son temps, on était alors en 1996, été (lourdement) suggérée par une amie d'enfance qui terminait des études de médecine, si j'y ajoute également ce que j'appelle, faute de terme plus adapté, le "regard amoureux" de mon neurologue historique la dernière fois qu'on s'est vu, comme celui de la doctoresse qui dirige l'établissement où j'allais très occasionnellement passer mes IRM (bon, aucun de ces deux derniers n'est non plus parti dans un discours sur les bienfaits du chamanisme, n'exagérons pas...), la coupe commence à être bien pleine.
Bref, j'ai un gros problème cognitif, sur ce coup... Et pour les jeunes diagnostiqué(e)s, je pose ça ici, faites-en ce que vous voulez

A bientôt,
Jean-Philippe.