Salut Zomo, sois la bienvenue parmi nous. Oui oui, tu es au bon endroit

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Zomorod a écrit :mon mari est atteint de Sep depuis 18 ans. On s’est connu il n’était pas au courant. Nous avons deux enfants.
Je n’est pas de problème à discuter avec lui je m’exprime librement mais souvent je n’ai pas beaucoup de réponse de sa part !
Je me pose encore des questions sur ce maladie qui me fait peur et commence à créer des distances entre nous.
Ta situation me rappelle beaucoup la mienne, mais vue par le camp d'en face, puisque c'est moi qui ai la sep et que c'est à mon épouse que revient tout le mérite d'essayer de s'en démerder

. Peut-être que ce que je vais dire va t'aider à comprendre ton mari, quoique comme on dit, et je ne l'oublie pas, il y a autant de formes de sep que de patients atteints (formule raccourcie : "autant de sep que de sépiens"). Lorsque j'ai fait ma toute première poussée, ma femme et moi n'étions pas encore mariés mais nous vivions déjà ensemble depuis deux ans, et nous nous connaissions depuis plus de cinq ans.
Nous parlons extrêmement peu de ça à la maison ; quand nous en parlons, genre au maximum une ou deux fois par an, c'est pour échanger trois phrases sur le sujet, en général au bout de trente secondes la discussion est déjà passée à autre chose. Ma femme n'est pas très demandeuse, note, mais je le suis encore moins.
Il faut dire aussi qu'en tant que patient, tu peux juger que tu n'as pas grand chose à en dire, ou plutôt, que rien de ce que tu pourrais en dire n'aurait le moindre intérêt vis-à-vis de ta conjointe... La sep est une maladie intime, très intime, et mystérieuse, et j'ai pris pour habitude de la considérer (dès ma présentation ici j'en parlais) comme ma maîtresse : c'est à dire déjà une
personne (car oui, je la considère comme une personne, avec notamment une vraie intelligence et de vraies réactions, positives ou négatives, aux signaux que je lui envoie), et une personne qui attend beaucoup de nous, avec laquelle on passe beaucoup de temps, avec laquelle on a une relation qui relève de la passion. Passion, étymologiquement, signifie d'ailleurs très exactement
souffrance... Tout ceci fait que par conséquent, on peut avoir envie de ne pas tout raconter,
en particulier à son épouse, de la nature exacte des rapports qu'on peut avoir avec elle. Ma maîtresse, quoi, je n'ai pas de terme plus approprié

. Je rappelle toutefois ma mise en garde : je ne prétends pas généraliser mon cas, "autant de sep que de sépiens", je ne présente que ma propre vision des choses.
Pour résumer ça en une phrase, quand ma femme me pose des questions sur ma sep, bin ça m'emmerde

. A part ça nous sommes mariés depuis... l'année de ma toute première poussée (1993), nous avons trois enfants dont les âges s'étalent aujourd'hui de douze à vingt-quatre ans, et nos relations sont au beau fixe. Il n'en a pas été ainsi pendant ma phase d'acceptation, qui a duré un peu moins de deux ans immédiatement après mon diagnostic, et pendant laquelle notre couple a été sérieusement mis à mal, de ma seule initiative. Il reste qu'à l'issue de cette phase d'acceptation j'aimais mon épouse plus que jamais, d'un amour que je savais enfin indestructible, qui n'a pas bougé depuis... et dont je doute qu'il serait devenu aussi fort sans la sep.
Il m'arrive d'être pris d'un certain remords vis-à-vis de ma femme. Comme je disais plus haut,
c'est moi qui ai la sep et c'est à mon épouse que revient tout le mérite d'essayer de s'en démerder : en tant que sépien, quand on t'annonce le diagnostic c'est une telle baffe dans la gueule, que ton entourage direct (conjoint, parents...), bah tu as un peu tendance à te foutre comme de l'an quarante de l'effet qu'une telle annonce peut
aussi avoir sur eux. Et pourtant... En tant que patient c'est, je pense, une attitude à la fois égoïste (tu négliges les angoisses de tes proches, alors qu'à la réflexion, elles doivent un peu se poser là...) et légitime (car après tout, c'est toi qui es malade, eux vont bien). Ce n'est pas simple, rien n'est simple...
Dans sa contribution à ma relation avec la maladie, je suis avant tout reconnaissant à mon épouse d'être un roc, un pilier, un point de repère immuable qui m'apporte stabilité et apaisement dans l'avenir. A mes yeux, c'est énorme, c'est capital, et ça me ramène à "c'est à elle que revient tout le mérite d'essayer de se démerder de ma sep"

. Je n'exclus pas que ton existence soit aussi cruciale aux yeux de ton mari, ça ne me paraît pas invraisemblable en tout cas.
Pour le reste, il faudrait nous en raconter un peu plus à propos de toi et de ton mari. Comment se porte-t-il, notamment ?
A bientôt le plaisir de te lire,
Jean-Philippe.