Coucou Loutre,
Loutregarou a écrit :Par rapport au fait que les poussées diminuent avec l'âge, est ce que ce n'est pas parce que les formes remittentes basculent ensuite en progressive pour certains?
Ca paraît presque trop beau haha
C'est vrai que ça fait longtemps que tu n'étais pas venue

. Alors je vais essayer de te la faire courte : il y a aujourd'hui un quasi consensus pour reconnaître qu'il y a deux composantes tout à fait distinctes dans la sep, une composante inflammatoire aiguë qui va provoquer les poussées, et une composante neurodégénérative à bas bruit, qui va lentement grignoter tes axones et provoquera volontiers une atrophie cérébrale, en moyenne (pas toujours, donc : ça n'est pas une fatalité) beaucoup plus rapide chez les sépiens que dans la population générale.
Ces deux composantes sont à l'œuvre dès le début de la maladie. La grosse différence entre les deux est que la première est encore plus visible que le nez au milieu de la figure (quand tu fais une poussée, tu la sens un peu passer), alors que la seconde, au début, est complètement invisible : du fait de la plasticité neuronale, quand un axone est détruit par la neurodégénérescence, le système nerveux trouve un autre chemin pour arriver à son but et on n'en parle plus.
Au bout d'un moment, les choses vont s'inverser puisque pour ce qui concerne la composante inflammatoire aiguë, tu feras de moins en moins de poussées avec le temps, puis plus du tout ; de son côté, les dommages causés lentement mais inexorablement par la composante neurodégénérative vont progressivement amener ta plasticité neuronale à court de solutions de rechange, ce qui pourra entraîner l'apparition de nouveaux symptômes, permanents ceux-ci, en dehors de toute poussée.
Il n'y a pas forcément de correspondance exacte entre la fin d'une phase récurrente-rémittente (qui représente donc la fin de la composante inflammatoire aiguë) et le début d'une phase secondairement progressive qui, de son côté, ne représente jamais que le moment approximatif où, après dix, quinze, vingt ans de lent grignotage à bas bruit des ses axones, la plasticité neuronale arrive à court d'options.
Ainsi, en cas d'une neurodégénérescence particulièrement rapide, on pourra être diagnostiqué en phase progressive (du fait de l'acquisition de nouveaux handicaps, acquis en dehors de toute poussée), tout en continuant à rencontrer des poussées par ailleurs : c'est ce qu'on appelle une forme progressive avec poussées surajoutées. A l'inverse, il peut (et fréquemment, encore) se passer plusieurs années entre la dernière poussée et le diagnostic de progressive. Dans les cas extrêmes que sont les formes primaires progressives, on peut considérer que la phase inflammatoire aiguë était tellement débonnaire qu'elle n'a pas provoqué la moindre poussée, tout en observant attentivement que les âges moyens de début d'une primaire progressive et d'une secondaire progressive sont remarquablement similaires.
Qu'on passe en progressive ou pas (une bonne proportion des phases rémittentes ne passent jamais en progressive, du fait d'une composante neurodégénérative suffisamment débonnaire dans leur cas), il arrive forcément un moment où on fait sa dernière poussée. Ce moment se situe en général entre quarante et cinquante ans, mais avec de grandes variations possibles : avoir des poussées au delà de cinquante-cinq ans est tout à fait exceptionnel mais peut se rencontrer, de mon côté j'ai fait ma dernière poussée un ou deux mois avant mes trente-trois ans. Je n'ai évidemment aucune certitude encore que c'était réellement ma dernière, mais à cinquante-sept ans j'ai l'espoir de tenir le bon bout.
L'intensité de la composante inflammatoire aiguë, qu'elle soit violente ou toute douce, n'a pas grand chose à raconter sur ce que sera l'intensité de la composante neurodégénérative : on peut considérer les deux composantes comme indépendantes (même si ça n'est pas forcément entièrement le cas, on peut rester sur cette idée).
J'ai lu aussi que la majorité de ceux qui ont un handicap négligeable à 10 ans de maladie ont aussi un score IDSS très faible à 30 ans de maladie. C'est plutôt encourageant surtout que la recherche avance en parallèle
C'était cette donnée statistique qui m'avait fait tenir jusqu'à dix ans de sep : arriver à mon dixième anniversaire sans handicap, ça me donnait un objectif à moyen terme. Ca avait aussi joué un rôle dans ma décision de décliner le traitement : c'était en 2003 que la question s'était posée, or à ce moment-là j'avais déjà fêté (certes de pas grand chose) le dixième anniversaire de ma sep.
Cela dit, quand tu vois aujourd'hui passer cette information, elle n'est plus très fraîche, ça a pu changer depuis

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A bientôt,
JP.