Coulinette,
Hoooo, merci, plein de questions à tiroirs multiples
Ma réponse va être bigrement longue, je préviens tout de suite Marg' et Tof' : passez votre chemin !
Linette2021 a écrit :Effectivement JP - et c'est exactement ce qu'ils regardent limiter les poussées permet de limiter l'handicap entre 2 poussées desquelles tu ne récupères pas totalement et 10 poussées desquelles tu ne récupères pas totalement il peu y avoir une belle différence en termes de séquelles.
Observation fort pertinente, mais.
J'ai un jour demandé, à ma voisine neuro, si on ne pouvait pas envisager la phase RR comme un escalier, chaque marche étant représentée par le handicap résiduel à l'issue de chaque poussée (ce qui rejoint directement la notion de degré de récupération à l'issue de la poussée), et par conséquent,
par rapport au handicap d'avant la poussée, une progression qui serait soit stable, soit croissante, mais en aucun cas décroissante. Ce handicap résiduel ne peut-il alors pas être considéré comme l'expression de la seule progression, c'est à dire de PIRA dont on sait justement qu'elle est à l'œuvre dès le tout début de la pathologie ? Si oui, alors la pente de progression ne dépend pas du nombre / de l'intensité des poussées (RAW) -- puisqu'elle dépend du rythme de neurodégénérescence (PIRA) -- et, dans ces conditions, réduire le nombre de marches (de poussées) revient directement à... augmenter la hauteur de chaque contremarche (réduire le degré de récupération à l'issue de chaque poussée, certes moins fréquentes mais ça nous fait une belle jambe puisqu'au bout du compte, on arrive au même niveau au même moment).
Tu en penses quoi ? Quand s'était posée pour moi la question du traitement et que j'étais allé demander son avis à Gout, son argument principal pour justifier son manque d'enthousiasme à initier un traitement était l'excellent degré de récupération dont je faisais systématiquement preuve après chaque poussée, aussi invalidante fût-elle sur le moment. Cette récupération qui restait excellente dans le temps lui permettait peut-être de supposer, dans mon cas, un rythme de neurodégénérescence (PIRA) particulièrement tranquille ? Peut-être se hasardait-il alors dans le tabou du pronostic individuel ?
Je ne sais pas si tu as lu la thèse ...
Oui, et même l'étude qui suit d'ailleurs, mais je n'ai pas été impressionné, la thèse contient selon moi des erreurs qui auraient éventuellement pu être excusées il y a vingt ans, mais plus en 2018

(je sais, je fais le gros branleur sur ce coup). Par exemple :
Thèse a écrit :D’un point de vue physiopathologique, une poussée est l’expression d’une inflammation focale, aigüe et récurrente du SNC [6], et elle est le reflet d’une plaque de démyélinisation dans la substance blanche. Les oligodendrocytes, qui sont à l’origine de la remyélinisation dans le SNC, permettent en général une récupération clinique de la poussée.
Moui, peut-être, sauf que le poids de l'action des oligodendrocytes dans la récupération clinique, s'il n'est pas tout à fait nul, est d'autant plus dérisoire que les oligodendrocytes, pendant la poussée, se font tout autant bouffer que la myéline des axones dont ils s'occupent (et une fois qu'ils ont été bouffés, il leur devient plus difficile de remyéliniser quoi que ce soit). D'autre part, si la remyélinisation reste possible, elle va prendre du temps, beaucoup de temps (ça se comptera volontiers en mois, voire en années), alors que dès que cesse l'inflammation de la poussée, la récupération clinique ne prend que quelques jours. Ce n'est donc pas la remyélinisation qui explique l'essentiel de la récupération telle qu'on la connaît, en fait c'est simplement la fin de l'inflammation qui va entraîner une résorption rapide de l'œdème que celle-ci provoquait, et le retour rapide à la "normale" qui va avec. Les symptômes que l'on ressent pendant une poussée ne sont en fait, pour l'essentiel, pas le résultat d'une quelconque
démyélinisation, mais celui de l'œdème provoqué par l'inflammation, lequel œdème joue le rôle de bloc de conduction (il bloque la conduction du potentiel d'action).
Je me pose d'ailleurs sincèrement la question (mais ça n'a rien à voir avec cette thèse, ça fait un moment que je me la pose) de l'influence réelle de la
démyélinisation sur le handicap. Un axone démyélinisé continuera, la plupart du temps, à transmettre ses potentiels d'action : moins bien, moins vite, mais ils passeront toujours. En revanche, un axone qui a disparu (parce qu'il s'est lui-même fait bouffer), c'est une autre histoire. Les fameuses "plaques" n'étant jamais que les zones où les astrocytes ont construit des... "croûtes"

, ce ne sont pas ces plaques en soi qui vont aggraver les symptômes provoqués par le mauvais état de l'axone qu'elles protègent, elles vont certes considérablement freiner la remyélinisation (car atteindre l'axone démyélinisé nécessitera de commencer par réussir à traverser la gliose astrocytaire : bon courage), mais n'aggravent a priori pas la conduction du potentiel d'action.
D'autre part, "[une poussée] est le reflet d’une plaque de
démyélinisation dans la substance blanche", je trouve la formulation un peu hâtive : d'une part parce qu'une poussée est volontiers multifocale (plusieurs foyers de
démyélinisation), d'autre part parce que la plupart des foyers (ou des lésions) restent asymptomatiques, or une poussée sans symptôme n'est pas une poussée. La question sous-jacente est bien entendu,
quel traitement proposera-t-on pour des lésions asymptomatiques ? Ca tombe bien, on y arrive tout de suite :
il est recommandé de supprimer le traitement ... mais à la condition qu'il n'y ait ni activité clinique ni radiologique ...
Voilà

. Selon cette formulation, s'il n'y a d'activité que radiologique (nouvelles lésions) sans activité clinique (ni nouveau symptôme, ni aggravation de symptôme existant), bah on traite quand même,
"on ne sait jamais, sur un malentendu, ça peut marcher"...
Comment cela permet d'anticiper JP? autant je sais qu'avec les lésions qui se rehaussent au glado on sait qu'il s'agit de lésions actives et que donc il y a un risque de poussée. mais je ne sais pas comment à partir de l'IRM on peut anticiper une SP. Je suis preneuse d'explications.
Il n'est plus, ici, question de lésions. Les lésions, c'est RAW, le handicap, ce n'est pas RAW, c'est PIRA : les lésions sont l'arbre qui cache la forêt. PIRA ou, pour être plus spécifique, le rythme de la neurodégénérescence, se mesure pas trop mal à partir d'IRM successives, en supposant une certaine correspondance entre l'évolution du volume / de la masse de l'encéphale (des outils pour mesurer tout ça sont intégrés aux logiciels livrés avec la machine), et la perte neuronale. Ce qui nous renvoie directement au degré de récupération à l'issue d'une poussée, ou encore au rythme de progression du handicap.
Et d'ailleurs j'ai une autre question: les lésions actives peuvent ne plus l'être sans traitement? ou est-ce que sans traitement elles finissent forcément en poussées.
Ce qu'on appelle une lésion active, c'est une zone qui "prend le contraste", c'est à dire une zone où la barrière hémato-encéphalique (BHE) est rompue et où par conséquent, des bestiaux aussi gros que les lymphocytes d'une part, et les molécules de gadolinium d'autre part, vont pouvoir se répandre depuis le sang à l'intérieur du SNC, chose dont ils sont bien incapables face à une BHE "en bon état de fonctionnement". On suppose que les lymphocytes qui arriveront à passer du sang vers l'intérieur du SNC y provoqueront immanquablement une inflammation, le gadolinium se contente de mettre en évidence les zones qui permettent aux lymphocytes de le faire.
On suppose par conséquent qu'une lésion active est soumise au feu des lymphocytes et est par conséquent le siège d'une inflammation en cours (avec œdème, tout ça). C'est uniquement quand l'inflammation sera terminée (résorption de l'œdème) que la gliose astrocytaire pourra commencer. La gliose astrocytaire va alors former, sur les lieux de l'inflammation, une plaque cicatricielle qui restera visible à l'IRM, mais sans inflammation (car sans rupture de la BHE, donc sans prise de contraste) on saura qu'il s'agit d'une ancienne lésion, d'un ancien combat.
Une lésion active finit toujours, quoi qu'il arrive, quoi que tu fasses, que tu la traites au Solumédrol ou à la poudre de perlimpinpin, par devenir inactive, ça prend juste un peu moins de temps avec le Solumédrol. Si une lésion active est appelée à devenir symptomatique, alors c'est
dès son apparition qu'elle le devient (voire même
avant son apparition, ce qui est absolument fascinant car cela signifierait alors qu'elle était déjà symptomatique
avant que les lymphocytes aient pu entrer dans le SNC, mais je ne vais pas t'embrouiller avec ça aujourd'hui...). En tout cas, c'est à ce moment, dès l'apparition des symptômes, que la poussée est officiellement déclarée ouverte.
En général, le symptôme apparaissant donc au début de la poussée, on arrivera plus ou moins à l'associer à une lésion qui prend le contraste au gadolinium à l'IRM. Une fois que la lésion en question deviendra inactive, par simple résorption de l'œdème, le symptôme s'atténuera considérablement, voire disparaîtra purement et simplement. Mais la lésion restera à peu près visible à l'IRM, du fait de la gliose astrocytaire. Ne pas oublier non plus que la plupart des lésions, actives ou inactives, sont asymptomatiques : c'est avant tout son emplacement précis qui déterminera si une lésion entraînera, ou non, un symptôme (ne m'en demande pas la cartographie précise, mais tu dois déjà savoir qu'une lésion sur le nerf optique ou sur le cervelet sera beaucoup plus susceptible d'être symptomatique qu'une lésion en périventriculaire).
conformément aux recommandations de l'ofsep seules les IRM de contrôle à 6 mois à un an sont faites avec glado celles sui suivent ne le sont pas. donc aujourd'hui mon IRM était sans. dans ce cas comment font ils pour savoir s'il y a des lésions actives puisqu'il ne voient pas celles qui se rehaussent au glado?
Ils ne le savent pas
A partir de la troisième, ils se foutent de savoir s'il y a des lésions actives, ce n'est pas le but d'une IRM de suivi, ce qu'on veut c'est mesurer l'apparition d'éventuelles nouvelles lésions : pas besoin de gadolinium pour ça. Ce que je peine plus à comprendre, c'est pour quelle raison on te fait tout de même passer les deux premières avec produit de contraste. Peut-être pour mesurer l'activité inflammatoire initiale du patient et classer sa sep entre active / très active / etc., afin d'orienter le choix du traitement qui va suivre ?
A bientôt,
JP.